Hello,
On va commencer par l’erratum. Dans le mail envoyé la semaine dernière, j’ai écrit que nous n’étions que 8 000 milliards d’humains. Je me suis un peu emballé, tu as dû t’en rendre compte. 8 milliards, c’est déjà pas mal, et c’est plus proche de la réalité. En tout cas, c’est très ironique que je me sois planté en voulant rappeler des ordres de grandeur 😅
Maintenant que c’est dit, comment vas-tu ? De mon côté, j’ai une to-do-list qui s’allonge. Je ne sais pas par où commencer alors je prends dans l’ordre et je reporte quand c’est trop WTF. Mais, globalement, pour une tâche raturée, deux naissent. On ne va pas se mentir, je n’en verrais jamais le bout.
Earth Is The Limit
Pour cette newsletter, par exemple, se posait la question du nom. Est-ce que je gardais “Sentient et sans pétrole” ? Tu as peut-être vu que j’étais déjà passé de sentience à sentient, d’ailleurs. Ah, pendant que je suis sur la sentience… Il est possible que tu te demandes ce que c’est. Je te conseille d’aller voir le superbe site sur la sentience du Projet méduses.
Bref, quel nom donner à ce projet de mail ? La réalité, c’est que je ne vis pas “sans pétrole”. L’ordinateur sur lequel je tape est plein de plastique. Et puis, après une table-ronde sur l’urgence écologique organisée par le Club de la presse d’Occitanie il y a quelques jours (le live-toots est là), je me dis que j’oublie de parler de justice, de biodiversité (au sens systémique). La réalité est que nous sommes des centaines de milliards d’individus sur Terre, que nous avons tous un intérêt à y vivre, dans la limite de ses ressources, quelle que soit notre espèce. Après un peu de réflexion, j’abandonne l’assonance et le jeu de mot sur “Sentient et sans pétrole” pour lui préférer Earth Is The Limit qui me semble tout englober.
« Les adjectifs ne qualifient plus, ils mentent, ils masquent le réel : le foie est "gras" plutôt qu'engraissé, le canard est nourri plutôt que gavé. #FOIEGRAS
Les évènements tragiques, gavage et abattage, deviennent soudainement festifs quand le morceau du corps est servi pour Noël. Et nos comportements s'en trouvent pervertis : on regarde avec émerveillement les oiseaux libres volés, des bouts d'oiseaux morts dans les assiettes »
Cela ne grippe pas les abattoirs
Près de 1,3 million de poulets, dindes et canards ont été abattus en France depuis le 1er août. Cela devient répétitif. Comme le rappelait Ouest France, en mars, alors que 10 millions de volailles avaient été abattues entre novembre 2021 et mars 2022, les abattages massifs concernent les "animaux malades mais aussi sains – préventivement.” Des syndicats agricoles demandent que l'État subventionne les éleveurs pour qu'ils cessent d'accueillir de nouveaux poussins ou canetons dans les secteurs les plus touchés. (franceinfo avec AFP)
Peut-être que les subventions pourraient être utilisées pour mettre fin aux élevages ? Actu.fr fait le portrait d’un ancien éleveur de vaches de Loire-Atlantique, Jacky Queraud, qui s'est converti aux légumineuses et céréales. Dans Slate, Laurent Sagalovitsch pose clairement la question : Jusqu'à quand vous allez continuer à bouffer de la viande ? Il écrit :
“À chaque fois que nous nous abaissons à manger de la viande, nous abaissons en même temps notre degré d'humanité. Et nous aggravons le réchauffement climatique.”
(Tu as vu que France bleu recommande 3 recettes de faux gras ?)
Le compte n’est pas bon
Le gouvernement veut remettre obligatoire la consommation de protéines animales dans les cantines scolaires, pour 8 repas sur 20 (4 avec des animaux terrestres, 4 avec des poissons). Greenpeace France dénonce ce projet d’arrêté et demande au gouvernement de ne pas entraver la mise en place d’une option végétarienne quotidienne pour les collectivités qui le souhaitent.
En effet, la consommation de viande est en grande partie responsable du changement climatique. Il est intéressant de voir sur le simulateur de l’ADEME que le mode d’alimentation modifie clairement les émissions individuelles de gaz à effet de serre. La restauration collective est un bon moyen d’opérer la bifurcation.
Dans l’article très complet de Reporterre, il y a ce paragraphe :
Pour le formateur en restauration collective Gilles Daveau, « le vrai problème est que nos repas manquent de diversité et que la viande y est surreprésentée ». Il plaide pour une transition alimentaire qui permette de créer un nouvel imaginaire autour du repas. Sortir de la structure « entrée, plat avec viande et garnitures puis dessert » pour repenser l’intégralité du repas. « Définir un repas par l’absence d’un aliment est contre-productif. Il faut réapprendre à cuisiner les légumineuses, leur refaire une place, souligne-t-il. Intégrer du houmous en entrée ou un gâteau de pois chiche en dessert, et sortir du plat fait de graines que les enfants n’aiment pas. »
Imaginaire, encore
Des chercheurs californiens ont étudié plus de 37 000 scénarios de films et téléfilms. Seulement 0,6% mentionnent le "changement climatique", lit-on chez France info.
"La grande majorité des films et des spectacles que l'on regarde se déroulent dans une réalité parallèle, où le changement climatique n'existe pas, ce qui entretient une illusion pour les spectateurs", analyse Anna Jane Joyner, la fondatrice de Good Energy, spécialisé dans le conseil aux scénaristes sur la question du climat.
Le changement culturel que nous devons opérer rapidement ne concerne donc pas uniquement l’alimentation.
La belle histoire
Au Québec, c’est un troupeau de vaches qui focalise l’attention. Il s’est évadé cet été et se cache dans les bois depuis. Même les cow-boys dépêchés n’ont pas réussi à les reprendre ! La Dépêche nous fait un topo complet.
"Le jour, elles restent cachées dans les bois mais dès que la brunante (le crépuscule) arrive, le soir, elles sortent, elles s'approchent des bâtiments, ouvrent des sacs, essayent de manger des récoltes..."
Ces jeunes vaches n’ont presque jamais connu la domestication. Alors, le Devoir s’interroge : “Les vaches peuvent-elles retourner à l’état sauvage ?” et conclue :
“Alors, oui, les vaches peuvent retourner à l’état sauvage. Les prochaines semaines seront néanmoins critiques pour le destin du troupeau en cavale en Mauricie : les efforts déployés pour le rattraper se poursuivront, la neige compliquera sa fuite, et la morsure du froid pourrait lui donner l’envie de retourner au bercail. Mais qui sait : peut-être poursuivra-t-il sa cavale et verra-t-on une population de vaches en liberté au Québec ?”
Ce serait une bonne nouvelle alors qu’une nouvelle étude indique que les animaux sont la clé de la restauration des forêts du monde.
Joyeux anniversaire Jonathan !
Jonathan fête ses 190 ans ! Il était là avant qu’on commence à émettre trop de gaz à effets de serre, ça semble fou. 1832, l’année présumée de sa naissance, pour te donner une idée, c’est aussi celle de Gustave Eiffel. Ah, Jonathan est une tortue et vit à Saint-Hélène.
Faits divers
En Isère, un aigle royal, qui appartient à une espèce protégée, a été retrouvé blessé par un tir. Ils sont maladroits ces chasseurs quand même…
À Rieux-Volvestre (Haute-Garonne), un chasseur est poursuivi après avoir abattu de deux balles un berger malinois qui était entré dans sa voiture. Il n’a plus le droit de chasser en attendant son procès, mince consolation.
Lundi, 2 renards ont été pendus à l’entrée de la commune de Dracy-Saint-Loup en Saône-et-Loire. L’association One Voice s’engage à “verser la somme de 10 000 € à la personne qui lui transmettrait des informations solides permettant d’identifier formellement, au-delà de tout doute raisonnable, les personnes responsables de ces actes”.
Jeudi, le véhicule de 36 vaches qui allait du Tarn-et-Garonne vers la Loire s’est renversé dans l’Allier. 17 vaches sont mortes dans l'accident. 20 minutes écrit que “trois vétérinaires sont (…) intervenus « dans le respect de la santé animale » et pour « éviter les souffrances autant que possible »”. Les 19 survivantes ont été donc été abattues à l’abattoir, après. Est-ce que ce monde est sérieux ?
Vendredi, maison en feu dans le Tarn-et-Garonne. Dans le titre d’actu.fr on trouve "un chat et un chien meurent dans l'incendie”. C’est rare que les non-humains soient ainsi pris en considération. Las, dans l’article, cette phrase terrible : “Le sinistre n’a fait ni victime, ni blessé, parmi la famille qui occupe la maison, mais deux animaux (un chat et un chien) sont malheureusement décédés dans l’incendie.” On peut donc être tué et ne pas être victime ? Il y a quelques années, un sondage montrait que les animaux dits de compagnie font partie de la famille. Ils recoivent, par exemple, des cadeaux à Noël.
Toujours vendredi, en Ariège, un sanglier blessé lors d'une battue, échappe aux chasseurs en plongeant, dans la rivière Salat. Mais il est tout de même abattu par les services de secours du fait de ses blessures, nous apprend la Dépêche.
Pendant ce temps…
La pollution de l'air est liée à un million d'enfants mort-nés par an, apprend-on dans le Guardian.
“Les autorités du Vanuatu, archipel de la mer de Corail, veulent déplacer des dizaines de villages vers des terrains plus élevés ces deux prochaines années, pour éviter qu’ils soient inondés par la montée du niveau de la mer provoquée par le dérèglement climatique.” 7sur7 / Belga Quand on dit qu’il y a urgence…
C’est tout pour aujourd’hui !
Bon week-end,
Philippe
P.S. : Comme tu t’en doutes, la photo d’illustration a été synthétisée par Dall-E.
P.P.S : La nouvelle couleur est Viva magenta, la couleur Pantone 2023 ;-)